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Orthorexie : comprendre ce trouble et comment en sortir

Orthorexie : comprendre ce trouble et comment en sortir

Dylan Patiram
Badge profil psychologue vérifié

Auteur :

Dylan Patiram

Psychologue Clinicien

Spécialisation TCC

Publication :

16 déc. 2024

Mise à jour :

Orthorexie : comprendre ce trouble et comment en sortir

10 min

Temps de lecture

🍏 L’orthorexie, c’est ce trouble alimentaire dont on parle encore assez peu, mais qui gagne en visibilité dans nos débats sur la santé mentale et nutritionnelle. Le Dr Steve Bratman a été le premier à décrire l’orthorexie, à la fin des années 1990 : ce phénomène se vit comme une sélection minutieuse de nourriture « pure », et une aversion profonde pour tout ce qui est jugé nocif. Le mot orthorexie vient de la fusion entre « orthos » (droit) et « orexis » (appétit) en grec, illustrant cette obsession pour une alimentation alignée et saine.


Ce trouble, qui n’est toutefois pas encore classé au même niveau que l’anorexie ou la boulimie, joue grandement sur le bien-être et la santé mentale des concernés.


Les adeptes de cette rigueur alimentaire scrutent chaque bouchée, anticipent leurs repas et vivent dans l’angoisse et la culpabilité à l’idée de déroger à leur discipline. Cette fixette peut mener à un repli sur soi, des carences, et d’autres soucis d'ordre psychologique.


Dans cet article, nous allons découvrir ce qu’est l’orthorexie, de ses symptômes à ses causes, comment on pose son diagnostic et, le plus important, les pistes pour s’en sortir.


Si vous ou un proche êtes pris dans cette obsession d’une nourriture saine, en comprendre les enjeux, les risques, et les solutions est essentiel.

L’orthorexie : zoom sur l'obsession d’une nourriture saine

L’orthorexie : zoom sur l'obsession d’une nourriture saine

Photo de MART PRODUCTION sur Pexels

À la racine du mot : définition et histoire


Imaginez un trouble du comportement alimentaire où la quête de la perfection dans l’assiette devient une obsession. Voilà l’orthorexie. Le mot lui-même est un voyage dans la langue grecque, alliant « orthos » (droit, correct) à « orexia » (appétit). 


Cette obsession de manger « correctement » a été identifiée pour la première fois en 1997 par le Dr Steven Bratman. Il a donné un nom à ce comportement qui ne cherche pas à réduire la quantité de nourriture, mais à en purifier à l’extrême la qualité.


À l’époque du Dr Bratman, c’était un débat tout neuf dans le monde de la nutrition et de la santé mentale. Contrairement aux troubles comme l’anorexie ou la boulimie, ici, les projecteurs sont braqués non pas sur combien on mange, mais sur ce qu’on mange.


Orthorexie versus manger sainement : quelle différence ?


En lisant le début de cet article, vous vous dites sûrement : « Je vois pas où est le mal de vouloir ce qui est le mieux pour son corps ! » Et vous avez en partie raison. Ah, manger sainement ! Voilà un but louable, n’est-ce pas ? C’est bon pour le corps, c’est bon pour l’esprit. Mais le problème, c’est quand cette noble quête bascule dans une fixation extrême. C’est l’orthorexie.


Là où un individu soucieux de son alimentation saura apprécier un écart sans culpabiliser, noyé sous une vague de plaisir coupable mais savoureux, une personne aux prises avec l’orthorexie sera prise au piège d’un régime draconien.


Ce penchant pour une alimentation « parfaite » se transforme en marathon de restrictions, de rituels autour du choix et de la préparation des aliments. Un pas de travers ? L’anxiété. Un repas hors de la zone de contrôle ? La panique. Ainsi commence un isolement, lent mais certain, de tout ce qui fait le sel de la vie sociale.

Plongée au cœur de l’orthorexie : quand manger sain devient une obsession

Plongée au cœur de l’orthorexie : quand manger sain devient une obsession

Photo de Toni Cuenca sur Pexels

Un monde en noir et blanc autour de l’assiette


Imaginez-vous passer vos journées à scruter chaque détail sur les étiquettes des produits, trier sans fin les aliments entre les « bons » et les « mauvais ». C’est le quotidien des personnes aux prises avec l’orthorexie. Pour eux, manger devient une quête sans fin pour tout ce qui est « pur » et « naturel » 🌿.


Leur réalité se divise en deux parties : les aliments purs, non traités, le Graal du bien manger d’un côté. De l’autre, la liste noire : toutes ces choses qu’ils jugent toxiques comme les snacks industriels, le gluten ou les produits laitiers. Ils embrassent une vie où les fruits et légumes bio règnent en maîtres, poussant parfois jusqu’au véganisme strict.


Mais à quel prix ? La joie de déguster un bon repas s’efface, la nourriture devenant plus une contrainte qu’une source de plaisir.


Le prix social et mental de la « pureté » alimentaire


Souffrir d’orthorexie, ce n’est pas seulement suivre un régime alimentaire extrême, c’est aussi vivre dans la crainte permanente du jugement, se retrancher des dîners en famille, des barbecues entre amis, de ces moments de convivialité où la nourriture sert de lien. Cette solitude choisie pèse lourd.


La peur de succomber à la tentation, de faillir à leurs propres yeux les conduit souvent sur le chemin de l’anxiété et de la dépression. Chaque repas en dehors de leur contrôle est une source d’angoisse. Leur exigence sans faille envers eux-mêmes alimente un mal-être profond, un cercle vicieux où la culpabilité et la peur du  « mal manger » sont omniprésentes.


Quand le bien-être physique cède le pas


Ironiquement, cette quête de l’alimentation parfaite se retourne contre eux. Les restrictions drastiques, même sous couvert de santé, peuvent induire des carences et de la malnutrition. L’équilibre est rompu, et le corps en paye le prix : fatigue, troubles du rythme cardiaque, problèmes de digestion. Les signes ne trompent pas.


Derrière la noble quête d’une alimentation idéale, l’orthorexie révèle ses pièges. Un équilibre perdu entre le bien manger et le bien vivre, un paradoxe où le trop de rigueur engendre une perte de contrôle sur sa vie. 💔

Les causes potentielles de l’orthorexie

Les causes potentielles de l’orthorexie

Photo de Ann H sur Pexels

Facteurs personnels et psychologiques


Provenant d’un mélange complexe de facteurs personnels et psychologiques, l’orthorexie se dévoile. Le pilotage minutieux de son alimentation devient pour beaucoup une quête de maîtrise face à l’anxiété, au stress, ou à l’incertitude qui parsèment leur existence. Cette course à la sélection draconienne des aliments « sains » devient leur phare dans la nuit, leur offrant un semblant d’ordre et de sécurité.


Le perfectionnisme monte également au créneau. Ceux qui sont pris dans les mailles du filet orthorexique se lancent dans la quête éperdue d’un régime alimentaire incorruptible, cherchant à toucher du doigt cet idéal de santé et de pureté tant convoité.


Derrière cette maîtrise en façade, se cachent souvent une vulnérabilité psychologique et une lutte pour l’estime de soi. Des critiques sur l’apparence physique ou l’alimentation, vécues par le passé, peuvent faire germer les graines de l’orthorexie. Se fixer des standards inatteignables, c’est parfois tenter de réparer son image, de se construire une armure contre les assauts du doute.


L’anxiété et le besoin de contrôle sont également des complices fréquents de l’orthorexie. Contrôler son alimentation devient alors une tentative de réordonner son univers, une pratique qui peut glisser vers l’obsession.


Influence des médias et des réseaux sociaux


L’ère digitale joue son rôle dans cette saga. Médias et réseaux sociaux, avec leurs étendards de beauté irréprochable et de standards de santé hautement édulcorés, deviennent de véritables catalyseurs. Ils attisent le feu des comparaisons et des insécurités, incitant certains à s’aventurer sur le chemin épineux des régimes extrêmes.


Les écrans débordent d’images de corps sculpturaux et de promesses de bonheur par le régime parfait, exacerbant l’insatisfaction et l’envie de se métamorphoser. L’abondance d’informations nutritionnelles et les discours d’experts en santé et nutrition deviennent un terreau propice à l’obsession de la pureté alimentaire.


Les scandales sanitaires et une méfiance grandissante à l’égard de l’industrie alimentaire poussent encore plus loin cette recherche d’aliments « purs » et « sains », témoignant d’un désir profond de retour aux sources, à l’authentique, au contrôle de ce qui nous garde en vie : notre nourriture.

Identifier l’orthorexie : un parcours semé d’embûches

Identifier l’orthorexie : un parcours semé d’embûches

Photo de NordWood Themes sur Unsplash

Les jalons du diagnostic


On démarre notre exploration du diagnostic de l’orthorexie avec une trousse à outils imaginée par le Dr Steven Bratman et ses collègues. C’est une véritable chasse au trésor 🕵️‍♂️.


Leur démarche ? S’inspirer des idées du DSM (Diagnostic and Statistical Manual of Mental Disorders), ce manuel de référence de la classification des troubles mentaux. Leurs critères sont les suivants :


🔹Critère A : l’engouement pour manger « parfaitement sain » est au cœur de tout. C’est quand, pour vous, manger devient une épopée émotionnelle ardue, surtout si vous croisez un croissant au beurre. Et perdre des kilos ? C’est souvent juste un effet collatéral, pas forcément le but premier de cette obsession.


🔹Critère B : l’enjeu, c’est quand cette obsession prend trop de place. Bonjour les désagréments : carences, chute libre du poids ou autres tracas dus à une alimentation trop cadenassée. Et si cela nuit à votre vie sociale, personnelle ou professionnelle, bingo, vous cochez cette case.


Et pour corser l’affaire, votre amour-propre et votre estime personnelle peuvent se retrouver kidnappés par cette quête du manger sain absolue. Les aliments « interdits » vous donnent des sueurs froides, et vos journées se retrouvent organisées autour de cette sacro-sainte alimentation.


La quête d’un diagnostic


Malgré une armada de chercheurs sur le pied de guerre, la recherche d’un diagnostic infaillible pour l’orthorexie reste introuvable. Le quiz de Bratman, avec ses dix questions, a vu ses espoirs de fiabilité validée s’envoler.


L’ORTO-15, concocté par un groupe d’Italiens emmené par Donini, a fait parler de lui. Il a même été traduit dans de nombreuses langues. Mais verdict ? Ses résultats ne sont pas totalement satisfaisants.


Il y a eu aussi une ribambelle d’autres tentatives : l’Eating Habits Questionnaire, la Düsseldorfer Orthorexie Skala et quelques autres. Mais au final, tout ce beau monde n’a pas encore trouvé la formule magique pour diagnostiquer l’orthorexie de manière infaillible 🧙‍♂️.


La mission continue mais il va falloir une dose supplémentaire d’ingéniosité pour enfin épingler ce trouble énigmatique. L’aventure pour comprendre et identifier l’orthorexie n’est définitivement pas terminée 🚣‍♂️.

Parcours de guérison : soutien et soins

Parcours de guérison : soutien et soins

Photo de Tima Miroshnichenko sur Pexels

L’essentiel de l’accompagnement médical et psychologique


La routine pour surmonter l’orthorexie nécessite une approche pluridisciplinaire, mariant suivi médical, nutritionnel et psychothérapeutique. Une passerelle médicale complète est essentielle.


Le médecin traitant, tout d’abord, peut identifier les maux cachés comme les troubles hormonaux et les carences en nutriments essentiels.


Primordiale, la psychothérapie se dresse en pilier, les thérapies cognitivo-comportementales (TCC) en tête, démantelant les logiques tortueuses et les comportements nocifs greffés à ce trouble. Ciblant l’allégement de l’anxiété et la décroissance des compulsions liées à l’alimentation, les TCC promettent un renouveau mental.


Les séances de TCC déroulent un tapis d’exercices, de moments de détente, et de simulations, équipant les concernés à naviguer parmi leurs émotions et à réajuster leurs paradigmes de pensée.


Non loin, les thérapies analytiques et les approches familiales et systémiques trouvent aussi leur place, la première plongeant dans les abysses des comportements tandis que la seconde tisse des liens affectifs solides, un baume spécifique pour les plus jeunes.


Conseils pour la vie de tous les jours


Face à l’orthorexie, réapprendre à manger au quotidien avec apaisement est une quête majeure. Cela passe par l’établissement d’objectifs tangibles, aspirant à une alimentation diverse et agréable.


La réintroduction prudente des aliments jadis ostracisés permet de varier les plaisirs et de renouer sans culpabilité avec ces mets. Se laisser guider par la faim et la satiété plutôt que par la rigueur des règles alimentaires permet de se reconnecter avec les besoins authentiques du corps.


Les groupes de discussion et les aides numériques sont des espaces de partage et d’entraide, offrant possibilité d’expression et conseils aux personnes naviguant dans la tempête de l’orthorexie, fortifiant la communauté dans son ensemble.


Pierres angulaires : l’appui familial et amical


L’ancrage offert par les proches est un phare pour ceux pris dans la tourmente de l’orthorexie.

L’environnement familial et amical devient un sanctuaire, empli de soutien et d’empathie. La clé réside dans une compréhension affûtée de ce trouble complexe, loin des critiques et jugements.  Pousser vers l’aide spécialisée et une participation active aux thérapies familiales s’avère porteur.


Un soutien émotionnel infaillible peut alléger le poids de l’isolement et activer la volonté de suivre le chemin de soins tracé.


L’environnement proche peut aussi jouer un rôle dans la pacification des tensions alimentaires, en instaurant un climat plus souple et équilibré face à l’alimentation.

Prévention de l’orthorexie

Prévention de l’orthorexie

Photo de RDNE Stock project sur Pexels

Éducation à une alimentation équilibrée


La prévention de l’orthorexie, cela commence évidemment dans notre assiette, avec une éducation alimentaire bien équilibrée. Il est fondamental d’inculquer, surtout aux jeunes pousses, l’importance d’une alimentation qui inclut tous les groupes d’aliments. 🍏🥩


En démystifiant chaque groupe d’aliments, leur rôle dans un menu varié, on écarte les régimes extrêmes et l’obsession mal placée.🥗➕🍰


Parler nourriture, c’est aussi s’attaquer aux aspects psycho et social. Faire comprendre que oui, craquer pour une sucrerie n’est pas un crime, cela fait partie d’un schéma alimentaire équilibré. En intégrant ces discussions autour des plats dans les écoles et les campagnes de sensibilisation, on sensibilise la jeunesse pour qu’elle soit à l’aise avec sa fourchette.


Cultiver une relation saine avec la nourriture


Cultiver un lien zen avec ce qui est dans notre assiette, c’est le secret pour tenir l’orthorexie loin de nos vies. Il s’agit de bien plus que miser sur les calories ou la composition nutritionnelle ; mais de donner la priorité au plaisir de goûter à tout. 🌈


Arrêter la diabolisation de certains mets et valoriser un état d’esprit positif face à l’alimentation, c’est primordial pour éloigner les fixations malsaines. Et ce combat contre l’orthorexie passe également par une lutte sans relâche contre les diktats de la beauté qui pèsent sur nous. 🙅‍♂️🙅‍♀️ Stop aux messages toxiques sur les corps parfaits, et oui aux ondes positives pour s’aimer comme on est. 


Encourager tout un chacun à se focaliser sur le bien-être total, plutôt que de courir après des idéaux inaccessibles, c’est par là qu’on commence à réduire les risques de tomber dans le piège de l’orthorexie. 💪

Conclusion

Conclusion

Photo de fauxels sur Pexels

L’orthorexie, ce n’est pas qu’un mot compliqué ou une tendance passagère. C’est un obstacle sérieux sur la route de la santé physique et mentale, souvent sous-estimé, mais dont il faut qu’on parle 🗣️.


Au début, tout part d’une envie très positive : manger mieux pour vivre mieux. Mais parfois, cela vire à l’obsession. On commence à définir sa vie par ce qui est dans son assiette, avec des règles alimentaires ultra strictes et une anxiété monstre dès qu’il faut manger hors de chez soi 🥦🚫.


Pour s’en sortir, c’est toute une équipe qu’il faut mobiliser : docteurs, nutritionnistes, thérapeutes... C’est le combo gagnant pour reprendre le contrôle. Parce que oui, manger sain c’est top, mais pas au prix d’une prise de tête constante.


Il faut réapprendre à prendre du plaisir dans son alimentation, sans calculer chaque calorie ou scruter chaque étiquette. C’est là qu’est la vraie santé, celle qui fait du bien au corps et à l’esprit ✨.


Si vous ou un proche vous trouvez dans cette spirale, c’est le moment de lever la main et demander de l’aide. Il existe de nombreuses ressources et personnes prêtes à aider pour ne pas rester seul face à ce trouble.


Vivre en équilibre, sans que la nourriture soit une source de stress perpétuel, c’est possible. Ne laissez pas l’orthorexie diriger votre vie. C’est le moment de changer la donne, de retrouver un rapport sain et joyeux avec l’alimentation, pour que chaque repas redevienne un moment de plaisir 🌈.

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